dimanche 11 septembre 2011

CINEMA DE MINUIT - DES GRIEFS CONTRE GRIFFITH...

Bonjour les amis !

Ce soir, à 00 H 15 sur France 3 : 6 courts-métrages réalisés entre 1911 et 1913 par D.W.Griffith...


David Wark Griffith est considéré comme le cinéaste le plus important des
années 10. On lui prête un certain nombre d'innovations fondamentales : montage parallèle, flash-back, travellings, plans américains, entre autres, qui ont donné au cinéma primitif, forain, une grammaire élaborée...
Il est également l'auteur du film le plus odieux de tous les temps *: "Naissance d'une Nation" (1915), apologie sans nuances de l'Amérique Blanche, au racisme effroyable , et qui, fut , c'est prouvé, à l'origine de la renaissance du Ku Klux Klan dans ces années-là.
L'affiche est d'ailleurs sans ambiguités :


Jusqu'à la fin du XXème Siècle, les cinéphiles acceptaient, tant bien que mal , cette atroce contradiction.
Mais, depuis une vingtaine d'années, des voix s'élèvent, notamment aux Etats-Unis, pour contester la place accordée à Griffith.
Nouvelle manifestation du politiquement correct ou saine remise en cause de l'Histoire du Cinéma ?
Eh bien, un peu des deux, en fait, à mon avis.
Il ne faut pas oublier que Griffith, tout comme Chaplin, avec qui il a fondé les Artistes Associés, était non seulement un homme talentueux, mais aussi un excellent publicitaire. Ses films fastueux, coûteux, avaient besoin de remplir les salles pour être rentables. D'où un matraquage médiatique, à la sauce de l'époque : presse, affiches, conférences, au service d'un culte de la personnalité . Griffith était un génie et il fallait le faire savoir.
Sa retraite anticipée à l'arrivée du parlant participa aussi en quelque sorte à ce myhte savamment entretenu.
Ajoutons maintenant que, dès l'arrivée du son, les films muets furent délaissés. Le support nitrate étant fragile, nombre d'entre eux se décomposèrent ou brûlèrent dans des incendies. On estime que 80 % ( !!!) des films tournés entre 1894 et 1930 sont perdus. Que subsiste-t-il, alors ? Ceux dont le nom avait été suffisamment claironné pour que l'on songe, quand même, à conserver leurs films. Griffith, comme Chaplin, fut de ceux-là, et , pendant très longtemps, il incarna LE cinéma des années 10.
Or, que se passe-t-il depuis vingt ans ? Eh bien, à l'échelle mondiale, une vaste opération de recherche et de restauration de films muets est menée par des organismes publics (Cinémathèques) ou privés (Lobster, en France, ou la Fondation Scorsese, aux EU).
Ces films sont projetés dans des festivals (Bologne, La Rochelle). Et tout comme les découvertes archéologiques bouleversent régulièrement ce que nous savons de la Préhistoire, ces projections modifient régulièrement les perspectives de l'Histoire de Cinéma.
Et concernant Griffith, la découverte, il y a quelques temps, de "Cabiria" de l'italien Pastrone (1914) a un peu remis les pendules à l'heure. Ce film, que Griffith a vu et admiré, comporte en effet certaines innovations importantes, dont... le travelling. Seulement voilà : Pastrone n'eut pas la postérité de Griffith...


Il est donc fort probable que l'étoile de Griffith vienne à pâlir dans les années qui viennent. Qui oserait, aujourd'hui, monter "Naissance d'une Nation" à des lycéens, leur expliquant que c'est un chef d'oeuvre de l'Histoire du Cinéma ?

Toutefois, il aura contribué au fait que l'on prenne le Cinéma, cet art forain, au sérieux. Et ça, ça restera toujours la grande qualité de ceux qui savent communiquer...

A plus.
Fred.

* Juste après l'infect "Jüif Süss" (1942), réalisé pour les nazis par Veit Harlan...

PS : Concernant l'anniversaire du 11 Septembre, j'en parlerai demain, aujourd'hui, ça bouchonne...

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