dimanche 20 novembre 2016

CINEMA DE MINUIT - HOTTE SPOT...

Bonjour les amis !

Ce soir, à 00 H 20, sur France 3 : L'Assassinat du Père Noël (1941), de Christian-Jaque...


 Voici un des films qui a fait la réputation de la sulfureuse  firme Continental, firme française à capitaux allemands, qui incarne à elle seule toute l'ambiguïté du Cinéma Français de l'Occupation .
C'est d'ailleurs le premier film produit par la Continental. 
Il est également un des films emblématiques (hors Carné-Prévert) , de ce que l'on a appelé le réalisme fantastique . 
A la base, nous n'avons pourtant qu'une intrigue policière commune : qui, le soir du 24 Décembre, a tué cet inconnu en habit de Père Noël ? Cela pourrait être le début d'un épisode de Barnaby...
Sauf que... Sauf que l'intrigue se déroule dans un village de haute-montagne , totalement enneigé et isolé , et que tout le monde soupçonne tout le monde dans un paysage immaculé. Le merveilleux est là.
Christian-Jaque, réalisteur prolixe, souvent inspiré, mais ô combien trop souvent opportuniste, retrouve ici la grâce qui avait déjà fait des Disparus de Saint-Agil, en 1938, une réussite...


Avec Very et Charles Spaak, il arrive à créer une véritable atmosphère d'étrangeté et d'inquiétude, dans un univers qui, comme dans les Disparus, tourne autour des enfants...
Dans la tradition de l'époque, la distribution est bétonnée : Robert Le Vigan, Fernand Ledoux, Jean Brochard, ainsi que les jeunes Raymond Rouleau, Bernard Blier et Renée Faure, incarnent ces villageois perdus, presque d'une autre époque.


Mais la distribution est dominée , encore une fois, par l'immense Harry Baur, interprète du père Cornusse, vrai-faux Père Noël, interlocuteur privilégié des enfants, et gardien des clés de cet univers.
La scène finale , où il parle aux enfants une mappemonde à la main, est restée justement célèbre. Les auteurs, à la Libération, pour se justifier devant les comités d'épuration, en ont fait une allégorie de la France résistante. Cela en a fait ricaner quelques-uns... Ce moment est surtout un pur moment de poésie et de lyrisme, dépassant carrément l'anecdote historique...

Un grand classique du cinéma français , à revoir ou à découvrir absolument.

Bande-annonce :


A plus !

Fred.


samedi 5 novembre 2016

CINEMA DE MINUIT - ON VOUDRAIT PARTIR MAIS ON RESTE...

Bonjour les amis !

Demain soir, à 00 H 20 : Les Amants de Vérone (1948) d'André Cayatte...


 En 1948, le tandem ¨Jacques Prévert- Marcel Carné bat de l'aile. Il est loin, le temps triomphal du Quai des Brumes et des Enfants du Paradis. Les deux enfants chéris du réalisme fantastique se cassent les dents sur la Libération et sur le film qui devait être la grande fresque du temps : Les Portes de la Nuit...


 Les deux auteurs sortent cassés de l'aventure : Carné , après avoir songé à abandonner le cinéma , verra deux de ses projets suivants ne pas aboutir : l'Espace d'un Matin , et surtout La Fleur de l'Âge, abandonné en plein tournage.
Prévert aussi est déçu , par un cinéaste qu'il trouve de moins en moins concerné par les problèmes politiques et sociaux du temps. C'est aussi le temps de la reconnaissance littéraire pour lui, ce qui le rend sans doute moins coulant. Les relations tendues avec Carné sont l'occasion pour le jeune cinéaste André Cayatte de débaucher le grand poète pour tenter , une nouvelle fois, de tisser la grande fresque du temps.
Il faut dire que le scénario de Cayatte a tout pour séduire Prévert  : à Venise, pendant la seconde guerre mondiale, on tourne Roméo et Juliette .  Dans le même temps, un souffleur de verre et la fille d'un industriel fasciste vivent l'histoire du couple mythique. Le contemporain, la passion , la poésie, le social, tout y est.
Un peu trop peut-être. Prévert lâche ses grands cheveux et le film est considéré, à juste titre, comme sa dernière grande oeuvre pour le cinéma.
Mais la mise en scène de Cayatte souffre un peu de la comparaison avec Carné. D'autant que le second marque le premier à la culotte.
D'abord , en soufflant à Carné son couple de jeunes premiers de la Fleur de l'Äge : Anouk Aimée et Serge Reggiani  !


Reggiani a déjà quelques années de cinéma derrière lui, il tourne depuis l'occupation, mais son jeu moderne et décontracté le cantonne paradoxalement aux rôles de voyous, comme dans... Les Portes de la Nuit !
Par contre, le film est, après le faux départ de la Fleur de l'Âge, le film qui lance la carrière de la toute jeune (16 ans !) Anouk Aimée, qui est charismatique, resplendissante... et qui a, pour une fois, à peu près, l'âge du rôle ! (Reggiani a dix ans de plus qu'elle !)
Elle parvient même à éclipser une autre belle actrice qu'on éclipsera plus très longtemps, la charmante Martine Carol, ici jouant une actrice capricieuse ( prémonition ?) .


Mais Prévert a le même défaut que Jeanson : même si les jeunes héros sont touchants , bien écrits, bien dialogués, ils sont étouffés par les monstres sacrés que l'auteur et le metteur en scène convoquent à leurs côtés, et qui sont tous de la maison : Pierre Brasseur ( les Portes de la Nuit), Dalio (Idem) , Louis Salou ( Les Enfants du Paradis) l'étrange Marianne Oswald, chanteuse atypique , qui fut une des premières à chanter du Prévert...


Ces machines de guerre sont fournies en munition par un Prévert qui en fait les Maudits de son film, les nazis, les fascistes, figures de cire, repoussoirs d'alors . L'émulsion entre l'univers de ces caricatures et celles de leurs douces victimes se fait, mais de manière assez cahotique... Encore une fois, comme dans Les Portes de la Nuit...

Soyons très clairs : Les Amants de Vérone est un film flamboyant, aux dialogues ciselés et poétiques, porté par une distribution impeccable, toutes générations confondues. Mais il marque aussi la fin d'une époque, d'un style : le réalisme fantastique d'avant-guerre n'a pas résisté aux horreurs du second conflit mondial. Il laisse la place , en cette fin des années 40, au réalisme noir, beaucoup plus désespéré, moins littéraire, porté par les oeuvres d'Yves Allégret et Jacques Sigurd...

Extrait : 


A plus !

Fred.