samedi 22 novembre 2014

CINEMA DE MINUIT - LA CHEVRE DE MONSIEUR FERNAND...

Rebonjour les amis !

Demain dimanche, à 00 H 20, sur F3 : François Ier (1937) , de Christian-Jaque...


 Cycle : Patrimoine Français...

Il y a des mystères dans l'Histoire du Cinéma . Pourquoi, de toutes les fernandèleries tournées par Fernandel, la mémoire collective a-t-elle retenu celle-ci ? Qu'a-t-elle de plus pour être si souvent diffusée, citée ? Personnellement, je n'ai pas la réponse...
Rappel : Fernandel fut, du milieu des années 30 à celui des années 60, l'acteur le plus populaire de France, devant Gabin, Gérard Philipe, Bourvil, et j'en passe. Il était donc le plus rentable, le plus bankable, comme on ne disait pas encore. Le public venait voir un Fernandel le samedi soir. D'où l'intérêt des producteurs pour un film centré autour de Fernandel, sans autre ambition que celle de faire des sous. Ce sont les fernandèleries . 
François Ier en est clairement une. Tourné rapidement et avec peu de moyens, le film repose presque sur un ressort unique : l'anachronisme. Honorin , brave garçon de cirque, se retrouve hypnotisé par un magicien, qui l'endort et l'envoie... à la cour de François Ier ! D'où péripéties, quiproquos, et problèmes dont le brave gars se sortira grâce à son Petit Larousse, qu'il a pensé à garder dans sa poche...
Plus que tout autre, ce film-ci repose sur le tempérament  comique de Fernandel, alors au sommet de sa forme, et au dynamisme du jeune Christian-Jaque, qui, à 32 ans, en est déjà à son vingtième film ! Le côté révision d'histoire donne également un côté désuet tout à fait charmant, mais le film souffre d'un souci véritable, sa distribution.
En effet, Fernandel n'est jamais meilleur que lorsqu'il est entouré de vieux routards du boulevard et du music-hall, souvent des copains, d'ailleurs, dont la vivacité accentue la spécificité du comique chavelin. Dans Ignace, il est entouré de Charpin, Saturnin Fabre et Andrex, qui entretiennent avec lui la loufoquerie du film :


Dans Barnabé, il est épaulé par Andrex et Paulette Dubost, dans Hercule, par Jules Berry et Pierre Brasseur, et dans Les Rois du Sport, fernandèlerie de luxe, il fait jeu égal avec môssieur Raimu !


Et même dans des projets un peu desespérants, il est parfois épaulé par des dialoguistes inspirés : Carlo Rim , souvent, et même Prévert pour l'improbable Ernest le Rebelle !


Ici, faute de moyens, sûrement, Fernandel est flanqué de Mona Goya et Henry Bosc, dont le jeu très daté vieillit considérablement le film. Le dialogue n'est pas non plus très fou. Le loufoque vient par petites touches, au gré de l'inspiration de Fernand : on notera ce moment délicieux où Honorin, sur le point de consulter  son Larousse, écarte un vase de fleurs pour éviter que celui-ci n'écoute...
Et puis, et puis, la fameuse, si fameuse, trop fameuse, scène de la chèvre :

Suivant son humeur, on trouvera cette scène ( assez éprouvante à tourner pour l'acteur) soit hilarante, soit horripilante.
Bref, plus que le mètre étalon de Fernandel dans ses oeuvres ( préfèrez les autres films que j'ai cités) , le film est une curiosité , de par son succès , et par la fenêtre qu'il ouvre sur ce qui faisait rire nos grand-parents...

Allez, une prime, une dernière chanson bien truffe !




A plus !

Fred.

PS : Bien sûr, j'ai parlé ici des films construits autour de la personnalité de l'acteur, écartant du même coup, les oeuvres, voire chefs d'oeuvre, tournés avec Pagnol, Duvivier ou Autant-Lara, qui, elles, sortent du champs des fernandèleries...



CINEMA DE MINUIT- STANLEY, JE RESUME...

Bonjour, les amis !


Dimanche dernier, sur F3, à 00 H 20 : Fear and Desire (1953), de Stanley Kubrick...

- Un ragoût froid sur une île en feu...
- Tu viens de donner une excellente définition de la Guerre... 

- Nous sommes tous des îles, des parties d'un univers fait d'îles...

- Je suis le Magicien ! Me voici maintenant Poisson !

Ce type de dialogues ampoulés et obscurs, le premier film de Kubrick en est truffé. Comme je l'évoquais la semaine dernière, les années 50 regorgeaient des petits films fauchés, réalisés par de jeunes loups voulant édifier le public avec leur vision du monde . Ils utilisaient le plus souvent le genre de la SF pour s'exprimer : Arch Oboler , et surtout, le fameux Ed Wood, noyaient leurs productions déjà vacillantes sous des flots d'aphorismes involontairement comiques...


Prétentieux et maladroit, le film l'est , incontestablement . Les interprètes déclament leurs répliques avec des trémolos dans la voix . Et même les idées formelles fortes ( les soldats des deux camps sont incarnés par les mêmes acteurs), sont au service d'une allégorie balourde, nous résumant l'homme et sa misère en 62 minutes chrono.
Mais . Mais il y a, dans ce pudding indigeste, un oeil. L'oeil d'un cinéaste. Les nanardeurs que j'ai évoqués savaient à peine où placer leur caméra, et étaient bien incapable d'en sortir la moindre émotion. Kubrick, quand il fait taire ses personnages, sait créer une émotion dramatique, une atmosphère de tension où l'espace (la forêt) , et les personnages font enfin corps et nous touchent . C'est particulièrement évident dans la scène où le soldat le plus fragile du groupe surveille, et enfin tue sa belle prisonnière (très bien coiffée pour une prisonnière, au passage)...Là, et dans une étrange scène de discussion de salon entre deux ennemis, l'émotion , le malaise, affleurent. Et l'image est magnifiquement travaillée pour une oeuvre aussi fragile.

 
 Il n'est pas étonnant que Kubrick ait attiré l'attention des gens du métier avec ce film bizarre. Derrière le pétard mouillé du film de guerre subverti, les plus clairvoyant ont su repérer un futur talent.
Peut-on deviner le futur auteur de Folamour, de 2001, de Barry Lyndon, dans cette oeuvre- ci ?
Franchement, je ne pense pas. Les kubrickiens trouveront bien des dizaines de correspondances entre cette oeuvre et les suivantes, mais, si l'on est de bonne foi, on conviendra qu'un océan de maîtrise et de maturité sépare ce coup d'essai du vrai film de guerre de Kubrick, Full Metal Jacket...



A plus.

Fred.

vendredi 14 novembre 2014

CINEMA DE MINUIT - STANLEY, JE PRESUME ?

Bonjour les amis !

Dimanche, à 00 H 20, sur F3 : Fear and Desire (1953), de Stanley Kubrick...


Voilà ce que j'appelle un film sauvé des eaux ... Des eaux où a voulu le noyer... son propre auteur !
Voilà le premier, le tout premier long métrage de Stanley Kubrick. Le père Stan, si soucieux de la postérité de son oeuvre, a tout fait pour que la moindre copie du film disparaisse et que sa filmographie "officielle" commence avec Le Baiser du Tueur (1955) et sa célèbre séquence de course-poursuites parmi les mannequins , maintes fois copiée depuis :



Mais, voilà, cette tentative inepte et prétentieuse ,d'après son auteur, existe encore. Kubrick a beau avoir racheté toutes les copies pour les détruire, deux sont parvenues à survivre, et ont permis une restauration du film en 2011. Et le voilà .
Certes, par rapport à ses  oeuvres ultérieures, Fear and Desire fleure bon le film de fin d'études. Financé à hauteur de 9000 $ , co-écrit par un camarade de classe, filmé et joué par des copains ( 5 acteurs, 9 techniciens), cette histoire de guerre entre deux nations imaginaires dans une forêt (?) semble plus touchante qu'imposante. Il n'empêche que le sens de la mise en scène caractérisant Kubrick fut alors remarqué par divers critiques universitaires ,et même par un producteur, qui injecta 50 000 $ dans l'affaire... pour le doublage , Kubrick ayant décidé de tout postsynchroniser, sans budgéter le coût !
Tout cela est bien alléchant. Je vais vous faire un aveu : moi non plus, je ne l'ai jamais vu, cet incunable .
Je vais me faire une joie de le découvrir en même temps que vous, et je vous ferai un retour dans la semaine !

Bande-annonce : 


A plus !

Fred.

dimanche 9 novembre 2014

DU BRUIT A CHAUVIGNY !

Bonsoir les amis !

Cette fois on y est : c'est ce soir (et demain !) que l'Amicale des Improvisateurs de la Vienne rencontre les Ephémères de Montréal  , à la Salle Charles Trenet de Chauvigny !!


Vous voulez des images d'impro ? En v'là !

Maintenant, vous n'avez plus d'excuses : vous enfermez Mémé (ou vous l'emmenez), vous mangez devant Drucker, et après, zou, à la salle !
On vous attend !

A tout à l'heure !
Fred.

samedi 8 novembre 2014

CINEMA DE MINUIT - FELICIE OH SI !

Bonjour les amis !

Demain dimanche à 00 H 20 sur France 3 : Félicie Nanteuil (1942-45), de Marc Allégret...


J'ai eu souvent, ici, l'occasion d'écrire les réserves que j'éprouvais concernant la carrière de Marc Allégret, réalisateur honnête mais surestimé, trop souvent porte par les qualités propres de ses auteurs (Jeanson , Pagnol)...



... ou le charisme de ses interprètes, notamment féminines . Allégret fut un sacré découvreur d'acteurs et surtout d'actrices : Simone Simon, Michèle Morgan, Odette Joyeux, plus tard Brigitte Bardot (avant Vadim) , et ici Micheline Presle, qu'il dirigera par trois fois sous l'Occupation, notamment dans l'oubliable Parade en Sept Nuits, où elle a déjà pour partenaire Louis Jourdan ....


Félicie Nanteuil est un OVNI. Ce projet, au départ obscur, adapté d'Anatole France, n'a au départ rien pour séduire : un cabotin de province séduit et lance une jeune arriviste , qui finit, évidemment, par le délaisser. Le cabotin se tue devant la femme et son amant. Félicie en devient presque folle de culpabilité. Une partie de la réussite du film, où l'on retrouve des motifs d'Une Etoile est née...


... et qui préfigure aussi le Eve de Mankiewicz...


... est probablement dans l'adaptation, cosignée par Curt Alexander. Ce dramaturge allemand était un des scénaristes favoris de Max Ophüls, notamment sur Liebelei et De Mayerling à Sarajevo, avant guerre...


Le romantisme , la noirceur de cette histoire, lui doit sans doute beaucoup.Le soin apporté à la reconstitution des nuits artistiques de 1890 , et la direction d'acteurs , impeccable, est, elle, à porter au crédit du réalisateur et de son équipe, où l'on trouve Pierre Prévert en assistant.


Micheline Presle, jusqu'ici abonnée aux rôles pétillants ou mélodramatiques, élargit sa palette en incarnant cette fausse ingénue, qui préferera le beau (mais toujours aussi fade) Louis Jourdan , à son bienfaiteur, interprété par l'impressionant Claude Dauphin.

Jeune premier discret dans les années 30, il devient une vedette du jour au lendemain, dans Entrée des Artistes (Allégret, encore !) , puis en tenant la dragée haute à Danielle Darrieux dans Battement de Coeur (1940) :


L'homme est talentueux, mais aussi fin, subtil, intelligent et intègre : il profite du tournage de Félicie et d'un autre Allégret avec Presle et Jourdan, La Belle Aventure, en zone libre, pour prendre des contacts . Et un beau soir, il part de Nice en bateau pour rejoindre l'Angleterre et la Résistance.
Cet engagement aura pour conséquence directe l' interdiction  pure et simple des deux films jusqu'à la Libération. Dans l'intervalle, Curt Alexander aura été arrêté, et , suivant les sources, serait mort en déportation ou aurait été fusillé...
Sorti en 45, dans un contexte différent, avec un public libéré avide de gaieté ou de fantasmagorie, Félicie Nanteuil passera presque inaperçu.
Depuis, critiques et cinéphiles n'ont de cesse de réhabiliter ce film, un des plus beaux tournés en France durant l'Occupation...

Extrait  :


A demain, à Chauvigny !

Fred.





lundi 3 novembre 2014

SOYONS INDIGNES A GENCAY !

Bonjour les amis !

Ce soir lundi, c'est au Cinéma de Gencay , à 20 H 30, que j'aurai le plaisir de vous présenter, dans le cadre des Séances Patrimoine CLAP, un ravissant  film français de 1965, signé René Allio : La Vieille Dame Indigne...

 
Jolie chronique provençale douce-amère , autour de l'émancipation tardive d'une dame de 82 ans, jouée par madame Sylvie !
Le film est également demeuré célèbre pour sa chanson de générique, signée Jean Ferrat :




A ce soir !

Fred .

Prochaine et dernière séance : le Dimanche 16 Novembre à 17 H 00 à La Crèche (79).

 

samedi 1 novembre 2014

CINEMA DE MINUIT - SOUS LE CIEL DE PROVINCE...

Bonjour les amis !

Demain dimanche, à 00 H 20 sur F3 : La Marchande d'Amour ( 1953), de Mario Soldati...


Quand il tourne La Provinciale en 1953, le cinéaste prometteur qu'était Mario Soldati n'est plus que l'ombre de lui-même. 
En 1942, son Malombra avait marqué la renaissance du cinéma italien, et tracé les jalons d'un mouvement, le Calligraphisme, sorte de revanche esthétique contre le fascisme ( J.Lourcelles.)
Mais Soldati eut du mal à confirmer, étouffé et dépassé rapidement par le néo-réalisme de Rossellini , Visconti et De Sica. Il signa une belle version d'Eugénie Grandet en 1947, avec Alida Valli...

 

... Mais fut de plus en plus contraint à de basses besognes, comme l'infâme Je Suis de la Revue, suite de numéros musicaux sans queue ni tête où même l'insubmersible Fernandel semble se noyer...



Après un Zorro et un Corsaire Noir, Soldati semble se réconcilier avec son genre de prédilection ; l'adaptation littéraire de haute volée. Ici, il adapte la Provinciale,  une nouvelle de Moravia, l'auteur du Mépris, grand spécialiste de la déréliction des couples. La nouvelle, et le film, nous montrent une sorte de Bovary italienne, incapable de se satisfaire de l'amour présent, et se précipitant elle-même dans le malheur...
Les critiques de l'époque ont cru voir dans ce film le renouveau d'un néo-réalisme alors en perdition. Soldati y retrouve une cohérence visuelle certaine, où le jeu des acteurs, la photo, les décors , s'unissent pour peindre une bourgeoisie perdue, qui s'ennuie, se dévaste, et se fait du mal . La grande audace du film est d'avoir confié le rôle si riche et important de Gemma (Bovary ?) , à une comédienne alors plus connue pour sa plastique , la chère Gina Lollobrigida.

Elle avait surtout brillé en France, jusqu'ici, faisant de l'oeil à Gerard Philipe dans Fanfan la Tulipe et les Belles de Nuit...

 




Fut-elle imposée par le producteur ? Toujours est-il qu'elle montre dans ce film une palette qui sera peu exploitée par la suite, puisqu'elle explosera aux yeux du monde cette même année 1953 dans le rôle de la sauvageonne Bersagliera de Pain, Amour et Fantaisie...

 

Ici, avec ses deux beaux gosses de partenaires, Franco Interlenghi et Gabrielle Ferzetti, elle ajoute une touche glamour à ce qu'il faut bien qualifier de nouvelle adaptation réussie de l'oeuvre de Flaubert.
Hélas, pour Soldati et le néo-réalisme, ce renouveau ne fut qu'un sursaut. Mario retourna à ses besognes, retrouvant Fernandel et Alberto Sordi pour Sous le Ciel de Provence, médiocre remake d'un classique, Quatre Pas dans les Nuages... 

En 1959, il retourne à son autre passion, l'écriture....

A plus.

Fred.