samedi 23 novembre 2013

CINEMA DE MINUIT - INNOCENT TESTAMENT...

Bonjour les amis !

Demain soir, à 00 H 15, sur France 3 : "L'Innocent" (1976) de Luchino Visconti...


Les cinéastes fantasment toujours beaucoup sur les oeuvres ultimes des grands auteurs. On a envie d' y voir le film de toutes les clés, la solution de l'énigme, le sens de l'ensemble. La réalité est hélas plus complexe. Le dernier film peut être un feu d'artifice, comme Gens de Dublin de John Huston...


... Ou un pétard mouillé, à l'instar du triste Complot de Famille du père Hitchcock...


Cela dépend de l'inspiration, de l'état de santé , moral et aussi physique , des chers cinéastes. Lorsqu'il attaque le tournage de L'Innocent, Luchino Visconti est malade, et contraint de tourner , pour des raisons de confort, des films intimistes. Si le précédent, Violence et Passion, avec Burt Lancaster, est, lui, bizarrement considéré comme le film testamentaire du maître, son authentique dernier film, lui, sera longtemps sous-estimé par la critique.
Et pourtant, quel dernier bouquet. Le Visconti des années 60, celui du Guépard, ne se faisait déjà pas d'illusion sur la corruption de la Haute Bourgeoisie, sa vanité, mais le trait dur s'accompagnait d'un amour immodéré pour la reconstitution du grand luxe XIXème et le charisme de ses grands hommes. Plus de dix ans plus tard, le trait s'est encore durci , et cette fois, les masques tombent.
Ici est adapté un roman des plus sombres de Gabriele d'Annunzio, faisant le portrait d'un pathétique grand bourgeois, fat, prétentieux et infidèle, qui, vexé de la liaison passionnelle que son épouse noue avec un écrivain, reconquiert celle-ci. Qui se retrouve quand même enceinte de l'amant. Le couple décide de garder l'enfant, mais le mari trop fier, tue volontairement celui-ci (l'innocent), lâchement, en lui faisant prendre froid. Devant la colère de sa femme, et ne sachant vivre autrement qu'en se mettant en scène , il met grotesquement fin à ses jours.
Nous sommes loin des ors du Guépard, même si le décor, entièrement constitué d'emprunts à des collections privées, est un régal pour les yeux. Nous sommes dans un récit de décadence, pour ne pas dire de folie.
Visconti voulait Alain Delon et Romy Schneider dans  les rôles principaux. Leur refus est peut-être à l'origine de la bouderie de la critique, qui croyait y voir un projet "au rabais". Au contraire, le charisme moyen des deux interprètes principaux accentue la sensation de vacuité dégagée par cet univers.


Laura Antonelli est alors abonnée aux comédies sexy, dirigées par des talentueux ( Risi, Campanile) ou pas. Elle est entre autres la star de Malicia, drôle de machin érotico-neu-neu, qui fut un des plus gros succès de l'année 1973 :


Bien qu'elle fut la compagne de notre Belmondo national, son rôle le plus ambitieux est bien dans L'Innocent. Elle se tire moyennement bien de ce rôle, il faut bien le dire , complexe, de femme à la fois coincée, passionnée, amoureuse puis névrosée (ouf !) . Mais elle porte magnifiquement bien les tenues d'époque...

( denière image du film, sublime...)

... Et son opacité constitue un excellent appui de jeu pour son partenaire Giancarlo Gianini.
Celui-ci est le pivot du film. Mal connu du grand public, il est pourtant un des acteurs les plus fins de cette époque , dans des personnages aussi bien distanciés que grotesques. Il porte le film sur ses épaules, à la fois dur, égoïste, pathétique, enfantin, et enfin ridicule. Ca n'engage que moi, mais je ne suis pas sûr que Delon aurait fait mieux, en tous cas il aurait tiré le personnage vers plus de charme, c'est certain. Et c'eut été dommage.
Car ce qui rend ce film touchant, c'est que l'on en sait plus, au fil des scènes,  si l'on doit envier ou plaindre ces nantis déconnectés du monde nouveau qui se crée alors,  ces quasi-fantômes qui s'inventent des enjeux, en pure perte , et en attendant la mort. 
Un film à redécouvrir, comme on dit dans Télérama.


A plus.
Fred.

BONUS : RIP Georges Lautner. Ce ne fut pas un très grand cinéaste, et il s'est d'ailleurs bien souvent banané. Mais il fut parfois un réalisateur inspiré, bien sûr avec Les Tontons Flingueurs, Ne nous Fâchons Pas, mais même sans Audiard, il fit parfois merveille, avec le méconnu On aura Tout Vu, avec Pierre Richard, et son fameux "A genoux, escalope !" ...


.. Et le sombre et passionnant Septième Juré, avec Blier et Francis Blanche , un peu avant les Tontons...

 

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