dimanche 13 mars 2016

CINEMA DE MINUIT - ¨PAS PERDU POUR TOUT LE MONDE...

Bonjour les amis !

Ce soir, à 00 H 20, sur F3 : The Lost Moment (1947), de Martin Gabel...

Le cinéma hollywoodien fourmille de pépites étranges, que le temps pousse sous les carpettes, jusqu'à une hypothétique redécouverte. C'est le cas ici, avec cette unique réalisation d'un collaborateur d'Orson Welles, Martin Gabel.

Il fit partie de son légendaire Mercury Theater à ses débuts, à la fin des années 30, et incarna notamment Javert dans sa version radio des Misérables. Reconnu comme acteur de théâtre, il décide de passer à la mise en scène de cinéma à la fin des années 40.
Cette époque est bénie pour qui désire faire un cinéma différent à Hollywood. Non seulement des européens immigrés , tels Lang , Renoir ou Ophüls, souhaitent être maîtres à bord de leurs films, comme ils l'étaient chez eux,  mais des grands directors, comme Ford ou Capra, se voyaient bien prendre un peu de liberté vis-à-vis des grands studios. Des  producteurs indépendants  vont leur permettre de tenter cette aventure.
Walter Wanger est de ceux-là .

Après avoir débuté à la Paramount, il prend sa liberté dès le milieu des années 30, produisant entre, autres, J'ai le Droit de Vivre de Fritz Lang.
Ford, Hitchcock et surtout Lang lui font confiance pour leurs projets les plus personnels. Wanger n'aime rien tant que les paris risqués, et les films considérés comme trop intellectuels par les grandes firmes ne lui font pas peur.
Or, le projet de Gable est ambitieux : adapter la nouvelle Les Papiers d'Aspern, d'Henry James. Un éditeur new-yorkais, désireux de retrouver les lettres d'amour d'un grand poète du XIXème siècle, se fait passer pour un écrivain au sein de la grande maison où vivent l'objet de cette passion, Julianna, âgée de 105 ans, et sa nièce, l'étrange Tina.
Le sujet est un formidable écrin pour un film d'atmosphère en quasi huis-clos, reposant sur un terrible secret.
Gabel a visiblement subi l'influence de Welles, ne craignant pas les audaces formelles, voire les excès : la composition d' Agnès Moorehead ( elle aussi ancienne du Mercury , et future Endora de Ma Sorcière bien-aimée) en Julianna, excessivement grimée et théâtrale, nous sort très vite du réalisme, tout comme le jeu borderline de Susan Hayward/Tina, véritable pierre angulaire du film.


Jusqu'ici, la jolie Susan végétait à la Paramount, qui ne lui offrait que des rôles secondaires. Elle claqua donc la porte et signa avec Wanger, qui lui proposa le rôle. Fûtée, elle l'accepta... et fit des merveilles dans ce rôle de femme perturbée, à la fois inquiétante et romantique. La Universal, distributrice des films de Wanger, la remarqua, et en fit une des plus belles figures du studio, qu'elle lâcha rapidement pour tourner avec Mankiewicz, Henry King, Nicholas Ray... Une très belle carrière , couronnée en 59 par un Oscar, et injustement oubliée aujourd'hui.
Moins finaud fut le choix de l'acteur principal, Robert Cummings.


Ce sympathique garçon donne toujours l'impression d'être là par défaut, ou à la place d'un autre qui n'était pas libre... Il donnait déjà cette impression dans le Cinquième Colonne, de Hitchcock (1942)...


Finalement, comme dans certains films de Bette Davis, la fadeur du partenaire masculin renforce la prestation de l'actrice, et The Lost Moment apparaît vraiment comme un film de femmes.
Soyons honnêtes :  Gabel n'est ni Welles, ni Cukor, ni Wyler, et sa belle tentative, si elle comporte de formidables éléments, n'est pas entièrement maîtrisée.
Néanmoins, l'échec critique et commercial du film, à sa sortie , paraît extrèmement injuste, d'autant qu'il a découragé Gabel, qui ne touchera plus à une caméra après ce premier essai. Il retournera, avec succès, au théâtre, et se contentera de paraître au cinéma  avec parcimonie, dans des seconds rôles... Dommage.

Bande-annonce (en allemand !) du film :


 A plus !

Fred.





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