dimanche 4 octobre 2015

CINEMA DE MINUIT - AVEC LE CARREFOUR, RENOIR POSITIVE !

Bonjour les amis !

Ce soir, à 00 H 20 sur F3 : La Nuit du Carrefour (1932), de Jean Renoir...

 Après le décevant Chotard et Cie diffusé la semaine dernière, quelle joie de retrouver un vrai Renoir ! Pas son meilleur film, selon moi, j'y reviendrai, mais en tous cas un jalon important de sa carrière, et sa seule rencontre avec l'oeuvre de Simenon.
1932 marque l'entrée de l'oeuvre simenonienne au cinéma, et par la grande porte, puisque deux films sortent cette année-là, mettant en scène le commissaire Maigret : La Nuit du carrefour, d'abord , et Le Chien Jaune, d'Abel Tarride. Ils seront rapidement suivis, début 33, de La Tête d'un Homme , de Julien Duvivier.
La Nuit du Carrefour est d'abord un des meilleurs Maigret de Simenon. Cette histoire très angoissante d'un crime commis près d'un des nombreux garages perdus qui fleurissaient alors au milieu des carrefours de France, s'avère sèche, nerveuse et troublante. Et toutes les versions filmées qu'il m'a été donné de voir étaient réussies, tant le dispositif de base était efficace. Il n'empêche, et c'est en cela que le film est important pour les renoiriens, Renoir décide de prendre des libertés de metteur en scène avec l'intrigue originelle. Il ne la modifie pas , non, mais au lieu de montrer l'arsenal déjà habituel du film policier français (interrogatoires, hypothèses, recherche de preuves), Renoir flâne et fait flâner ses acteurs , le plus souvent de nuit, sur les lieux du crime. Les personnages sont peu diserts , et le malaise s'installe . Tout cela donne un film un peu cotonneux, très original, mais où l'on perd , finalement, l'intérêt pour l'enquête policière.
De plus, Pierre Renoir campe un singulier Maigret .

Sans doute influencé par ses sympathies anarchistes d'alors, qui allaient l'emmener tout droit vers Boudu, Renoir fait composer à son frère un Maigret sombre, peu sympathique, plus proche du cogne cher aux libertaires que du bon papa qui sait écouter. Difficile de s'attacher au personnage.
Le malaise est accentué par le jeu de l'actrice Winna Winfried.


 Cette obscure actrice danoise, dont c'était le premier film, a fasciné Renoir. A tel point qu'il a développé à l'envi les scènes où elle apparaît. Si la jeune femme est fort belle et photogénique, son accent à couper au couteau n'aide pas à la compréhension du film, loin de là ! A tel point que le film véhicule des légendes invraisemblables : les deux dernières bobines auraient été perdues par l'assistant Jean Mitry ( futur fondateur de la Cinémathèque Française) , ce qui expliquerait la durée inhabituelle (70 minutes !), du film, ou alors la script-girl aurait fait de colossales erreurs , ou bien, pour finir, Renoir aurait été soûl tout le long du tournage !
Quoi qu'il en soit, l'intrigue est , au final, assez incompréhensible. La mise en scène audacieuse, inspirée, de Renoir , fait tout le sel de cette envoûtante Nuit du Carrefour.
De là à écrire , comme le fit Godard, que c'est le meilleur film d'aventures de tous les temps, il y a un pas que je ne franchirai pas, attaché que je suis à défendre plutôt le film de Duvivier, La Tête d'un Homme, sorti, donc, l'année suivante, et où Harry Baur compose, lui, un Maigret pétri d'humanité.

Je préciserai pour terminer que cette critique se base sur la copie assez abîmée qui circule depuis quelques années, et qui est , sans doute, celle qui sera diffusée ce soir. Peut-être qu'une restauration du film, si elle est possible, et notamment du son,  permettrait d'apprécier au plus juste sa valeur . En l'état, c'est un peu compliqué.

Extrait du film de ce soir : 



 A plus !

Fred.








1 commentaire:

  1. C'est exactement ça Fred : si on n'a pas lu le livre ou bien vu les adaptations postérieures on ne comprend rien de l'intrigue (ou presque) et rien aux évènements. Il n'empêche qu'il y a dans ce film, plutôt mineur quand même, une atmosphère glauque propre à Simenon. Pierre Renoir est tout à fait étonnant dans le rôle du commissaire Maigret, assez antipathique en effet. Je trouve pour ma part Winna Winfried sublime avec son accent pas possible. Et puis il y a un long plan séquence d'une course poursuite nocturne avec canéra embarquée dans l'auto (bon dommage que les moyens techniques mis en oeuvre ici ne soient pas top). J'imagine bien comment entre autres cette séquence a pu plaire à Godard !

    La superbe version avec Bruno Cremer (Maigret), Sunnyi Melles et Johan Leysen (la soeur et le frère) et Roland Blanche (le mécano) de 1992 est finalement assez proche du film de Renoir, avec comme différence qu'ici on comprend vraiment ce qui se passe.

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