vendredi 27 octobre 2017

CINEMA DE MINUIT - CONTE DE PARIS ?

Bonjour les amis !

Dimanche, à 00 H 20, sur France 3 : Monseigneur (1949), de Roger Richebé...



Le producteur Roger Richebé (qu'Henri Jeanson avait surnommé Pauvre C... à cause de son côté terre-à-terre et d'une dyslexie qui lui faisait inventer des expressions nouvelles toutes les cinq minutes) n'était certes pas un grand réalisateur. Mais il avait du nez pour flairer les bonnes histoires. Et il faut avouer que cette histoire d'un ouvrier qui se retrouve descendant de Louis XVI était originale pour l'époque.
Et Richebé, qui n'était jamais meilleur que quand il se faisait remplacer à la mise en scène, avait également du flair pour s'entourer. Ici, il recrute pour les dialogues Carlo Rim, qui, depuis une quinzaine d'années , signe des histoires loufoques , notamment pour Fernandel (l'Armoire Volante) .
Et surtout, il blinde la distribution de son petit film : sont sollicités les excellents Fernand Ledoux, Yves Deniaud, Maurice Escande et Paul Frankeur. Et donne le rôle principal à Bernard Blier, qui était alors jeune et relativement mince, et alternait les rôles de français moyen sympathique chez Le Chanois, et de mari médiocre chez Clouzot...




A la photo, il prend Philippe Agostini, opérateur fétiche de Carné, Bresson et Autant-Lara .
Résultat, il ne confectionne qu'un gâteau au yaourt, certes, mais qui aurait été confectionné avec des ingrédients bio.
Voici donc un petit film sympathique et sans prétention, qui démontre comment le cinéma du samedi soir pouvait tenir son rang , juste en additionnant des talents...



A plus !

Fred.


samedi 21 octobre 2017

CINEMA DE MINUIT - UN JUGE, UN FILS...

Bonjour les amis !

Demain, à 00 H 15, sur F3 : Le Coupable (1936), de Raymond Bernard...



En v'là, du mélo, en v'la, mais cette fois, de haute tenue ! Cette histoire de magistrat se retrouvant à devoir requérir contre son fils naturel, accusé de meurtre, aurait pu simplement n'être qu'une histoire à faire pleurer Margot.
Heureusement, deux fins esprits sont aux commandes : d'abord, le scénariste Bernard Zimmer, proche de Giraudoux, Jouvet,  Dullin, qui n'hésite pas à faire du film une charge contre la société bourgeoise de l'époque. L'hypocrisie de classe étant ici un des facteurs dominants du drame.
Et qui plus est, le film est réalisé par un Raymond Bernard alors au sommet de son art. Son talent de directeur d'acteurs est ici évident : il réussit à contenir un Pierre Blanchar souvent grandiloquent, et rend Madeleine Ozeray et Gilbert Gil supportables.
Le film est grandement aidé par des seconds rôles de première classe : Marguerite Moreno, Gabriel Signoret, Suzet Maïs.
Bref, un bel exemple d'une certaine grandeur du Cinéma Français des années 30. A voir.

A plus !

Fred.




dimanche 15 octobre 2017

CINEMA DE MINUIT - LUIS SAUVE DES EAUX...

Bonjour les amis !

Ce soir, à 00 H 15, sur F3 : Viridiana (1961), de Luis Bunuel...


A la fin des années 50, nul n'aurait misé gros sur l'avenir de la carrière de Don Luis Buñuel. Celui qui fut, à l'orée des années 30, avec Dali, le porte-drapeau du surréalisme cinématographique, avec Le Chien Andalou et l' Âge d'Or...




... Survivait au Mexique en acceptant des oeuvres variées , souvent commerciales, souvent fauchées, mais où, confiait-il, il ne s'était jamais renié. Certains de ces oeuvres apparaîtront d'ailleurs plus tard comme  fulgurantes (El, La Vie Criminelle d'Archibald de la Cruz).
Et puis un jour, à l'orée des années 60, un producteur, sans doute un fou, lui laissa carte blanche pour réaliser le film qu'il voulait. Qui plus est, pour des raisons financières, ce producteur choisit de délocaliser le tournage... En Espagne.
L'Espagne. Le pays natal de Buñuel où celui-ci n'avait plus remis les pieds depuis la fin de la Guerre Civile . Une Espagne alors franquiste jusqu'au bout du calot. Mais qui, miraculeusement,  laissa faire. L'Art, dans le pays, était évidemment au point mort, et le Directeur Général de la Cinématographie pensa pouvoir "récupérer" Buñuel, l'impossible militant républicain, pour la gloire du régime et de ses valeurs bigotes.
Le cinéaste avait en effet décidé de raconter la vie d'une sainte, Viridiana,mais...  en modernisant le sujet. Moderniser est un faible mot. Viridiana, ici, est une jeune novice (SIlvia Pinal), qui, avant de formuler ses voeux, vient saluer son vieil oncle (Fernando Rey). Celui-ci tombe éperdument amoureux d'elle et veut l'épouser. Elle refuse. Il se donne la mort. Devenue héritière, elle décide d'accueillir les mendiants du village dans la propriété, malgré l'hostilité de son cousin, un rustre qui l'attire. Mais les mendiants, en son absence, pillent la maison, puis tentent de la violer. Choquée, désabusée, elle accepte de continuer ses jours avec le cousin et sa maîtresse, la servante, formant ainsi un étrange ménage à trois.
On est loin, très loin, de l'hagiographie espérée par le gouvernement espagnol, qui, pourtant, visa le scénario sans rien y trouver à redire.
Le film est projeté au dernier jour du Festival de Cannes. C'est un triomphe critique (le film partagera, à la dernière minute, la Palme d'Or avec Une Aussi Longue Absence d'Henri Colpi) , et un énorme scandale. L'Osservatore Romano, organe officiel du Vatican , déclare le film "sacrilège et blasphématoire". Le gouvernement espagnol, furieux , vexé , interdit immédiatement le film sur son territoire, lui retire à postériori (!!!) son autorisation de tournage , et va jusqu'à obtenir le retrait de la nationalité espagnole pour le film, qui devient mexicain, comme son producteur.
Mais pour les cinéphiles et une partie du public, c'est le retour du trublion de l'Âge d'Or;
Pourtant, Buñuel niera toujours avoir voulu faire scandale. Ce qu'il voulait, c'était confronter une croyante sincère, enfermée dans ses certitudes et dans un couvent... Au monde réel, à sa dureté, sa cruauté et son animalité. Ce n'est pas un film-manifeste comme pouvait l'être Le Chien Andalou, c'est un film où un cinéaste, un grand cinéaste, affirme sa vision du monde.
Cinéaste dont la carrière est relancée : en 1963, il accepte la proposition d'un producteur français de filmer Le Journal d'une Femme de Chambre , d'Octave Mirbeau . Il rencontre à cette occasion un jeune scénariste : Jean-Claude Carrière. Le deuxième Âge d'Or (si je puis dire) de la carrière de Buñuel peut commencer.


Extrait du film de ce soir :


A plus !

Fred.

samedi 7 octobre 2017

CINEMA DE MINUIT - VOILA LES BOULES PUANTES !

Bonjour les amis !

Demain, à 00 H 20, sur F3 : L'Assaut (1936), de Pierre-Jean Ducis...


En France, au milieu des années 30 , la politique politicienne n'a (déjà) pas bonne presse. Les scandales de corruption, telle l'affaire Stavisky, l'instabilité endémique des gouvernements de la IIIème République , ont entraîné deux évènements majeurs : la manifestation du 6 Février 34, côté extrême-droite, et, côté gauche, la victoire du Front Populaire, soulevant de nouveaux espoirs.
On ne compte plus, à cette époque, les comédies et drames mettant en scène des parlementaires et banquiers filous , se faisant leur beurre sur le dos du contribuable ( Topaze, Ces Messieurs de la Santé, la Banque Nemo).


C'est sans doute ce qui a décidé un producteur à déterrer une pièce déjà ancienne (1912 !) du dramaturge à la mode Henry Bernstein . Ce spécialiste du mélodrame bourgeois s'y essayait à la satire grinçante , en montrant comment un leader de parti politique (Charles Vanel) , victime d'un scandale mené par un maître-chanteur , (Alerme), se retrouve lui-même contraint  à employer des méthodes poisseuses pour se sortir de l'impasse.
On peut toujours rêver de ce qu'un Robert Siodmak ou un Raymond Bernard auraient pu tirer d'un tel sujet. Hélas, et bizarrement, ce fut Ducis. Pierre-Jean Ducis. Réalisateur de rien, ou de si peu. Un Cavalier Lafleur pour Fernandel , un Au Son des Guitares, pour Tino Rossi, et d'autres oeuvrettes francement mineures, et je suis gentil.


Alors réalisateur maison du producteur Henri Ullman, il filme sans conviction une oeuvre de pure circonstance, heureusement tombée dans l'oubli .
Reste la distribution, avec un Vanel comme toujours impeccable, et deux autres comédiens qui vaillent qu'on s'arrête sur eux :


André Alerme , s'il débuta sur les planches dans les drames de Bernstein, devint rapidement un habitué du Boulevard , où son énergie, sa rondeur, firent merveille. Le cinéma parlant balbutiant s'empara de sa silhouette bedonnante et ne la lâcha plus, pour tout et n'importe quoi , un n'importe quoi où il emporte généralement le morceau, comme dans le film de ce soir. Rares furent les cinéastes qui lui proposèrent mieux, à part Jacques Feyder, Autant-Lara et Edmond T.Gréville.



Le cas de Miss Alice Field est plus anecdotique, quoique édifiant : elle est le type même de l'actrice décorative dont le cinéma des années 30 était étrangement friand. Elle ne tournera presque que des navetons, entre 1930 et 1942, sous la direction des meilleurs spécialistes du genre : René Pujol, Berthomieu, Jean Kemm... Si on considérait Danielle Darrieux comme du Champagne, miss Field était plus proche du Champomy !
Elle se raréfiera après la guerre , et fera un petit come back à la fin des années 60, dans l'émission Au Théâtre Ce Soir...
Ironie du sort, elle ne rencontrera un grand cinéaste que pour son dernier rôle : dans le Playtime de Tati, en 1967.

A plus !

Fred.





dimanche 1 octobre 2017

CINEMA DE MINUIT - A CHIPER A CHOPER !

Bonjour les amis !

Ce soir, à 00 H 20 sur F3 : Pris au Piège (1949), de Max Ophüls...


C'est l'échec commercial de ses deux films précédents, L'Exilé, et surtout le superbe Lettre d'une Inconnue, deux films d'époque, qui obligent le grand Max Ophüls à se colleter avec l'Amérique contemporaine.



Le contexte n'est pas jojo : projet porté par les obscures Enterprise Productions, et adaptation d'un banal roman de gare. Dur, après Stefan Zweig !
Pourtant, à y regarder de plus près, le générique est assez exaltant : scénario signé Arthur Laurents, déjà auteur de La Corde pour Hitchcock , futur librettiste de West Side Story et maître d'oeuvre de Nos Plus Belles Années pour Sidney Pollack.



Ainsi que d'autres petits jeunes prometteurs ! Les assistants sont Robert Aldrich et John Berry (qui a dirigé quelques scènes), et le monteur Robert Parrish.
Quand à la musique, elle est signée par le compositeur fétiche de Marlène Dietrich, Frederick Hollander...
Et pourtant, le résultat est un peu... Bancal.
Pourquoi donc ?
Eh bien, d'abord , par la faute du scènario, qui oscille entre film noir et fil de femme : une jeune midinette ambitieuse (Barbara Bel Geddes) choisit , pour réaliser ses rêves, d'épouser un milliardaire (Robert Ryan). Pas de chance , celui-ci a de gros soucis psychologiques, qui l'amènent à mépriser ce qu'il a conquis, y compris sa femme. Son comportement odieux amène cette dernière à partir, et à soigner les pauvres malheureux auprès d'un médecin compatissant (James Mason)... Dès lors, le coeur de la dame balance...
Ophüls, cinéaste amoureux des femmes, a du mal à cerner son héroïne, pour le coup trop naïve. Il la filme joliment, mais s'intéresse finalement plus à ce milliardaire triste, seul, prisonnier de sa manie du pouvoir. Ce qui fait irrésistiblement penser à Citizen Kane, y compris dans la forme du film. Quand à Mason, fraîchement débarqué à Hollywood, son charisme suffit à épaissir un rôle finalement assez conventionnel.
Entendons-nous bien : on retrouve ici le styliste Ophüls, chaque scène est l'occasion d'un tour de force technique, au service de la dramaturgie. Mais on passe à côté du tragique qui nappe Lettre d'une Inconnue ou Madame de... 


Barbara Bel Geddes ( actrice fétiche de Hitchcock et future Miss Ellie de la série Dallas ) est certes convaincante en provinciale prise au piège, mais son personnage manque , pour tout dire, de noblesse pour être une grande héroïne ophulsienne . Ce qui réduit l'affrontement , ou le choix à faire, à un traditionnel  good guy/bad guy sous influence wellesienne...

Ophüls retrouvera tout son mordant (et James Mason !) dans son film suivant, Les Désemparés...


Extrait du film de ce soir :



A plus !

Fred.

CINEM